L'Homme qui a fait fortune sans toucher au pétrole: Aliko Dangote l'homme le plus riche d'Afrique


                 Nous sommes dans le nord du Nigeria, à Kano, la deuxième ville du pays et le fief d’Aliko Dangote, l’homme le plus riche du continent africain et l’une des stars de l’édition africaine du Forum économique mondial qui a lieu à Kigali, au Rwanda, du 11 au 13 mai. En déambulant dans les allées sablonneuses du Dawanau Market, le plus grand marché aux céréales d’Afrique de l’Ouest, impossible d’échapper à son nom. Partout, des camions, des enseignes et des sacs de ciment entassés portent la marque « Dangote ».
 
Vêtu d’un boubou de notable sahélien, un vieil homme de 90 ans, yeux sombres aux contours turquoise, a bien connu les débuts de l’enfant prodige de Kano. « Aliko, je le connais depuis avant même qu’il naisse. Son père était un ami très riche qui exportait ses arachides dans tout le Sahel. Il est mort tôt [en 1965] et c’est le grand-père d’Aliko, Sanusi Dantata, qui l’a pris sous son aile, dit El Hadj Ahmed Uba, le fondateur du marché Dawanau. C’est avec lui qu’Aliko a appris les affaires. »
 
Kano, ancienne étape caravanière peuplée de 12 millions d’habitants, est un hub commercial pour au moins huit pays de la région, des bords de la Méditerranée au golfe de Guinée. On y achète et on y vend de tout depuis des siècles. « Les traders de la ville sont impitoyables en affaires. Ce n’est pas un hasard si c’est l’un des nôtres qui est devenu le plus riche d’Afrique », souligne Ahmed Rabiu, un commerçant local.
 
Aujourd’hui âgé de 59 ans, le tycoon nigérian Aliko Dangote dispose d’une fortune personnelle estimée par la revue Forbes à 16,7 milliards de dollars (14,6 milliards d’euros). Il est l’une des figures attendues au Forum économique mondial africain.
Son empire, le plus puissant du continent avec des usines dans dix-huit pays, il le doit à une stratégie très simple : obtenir du pouvoir politique que certaines importations soient freinées ou bloquées, puis démarrer une production locale en visant le monopole. Cela a fonctionné dans trois secteurs : le sucre, la farine et surtout le ciment.
 
Cette expansion très agressive est habillée d’un discours de « bienfaiteur » de la nation, voire du continent : l’Afrique ne s’enrichira pas tant qu’elle continuera àexporter des matières premières et à importer des produits transformés, ne cesse de répéter Aliko Dangote, convaincu d’avoir un « destin », et affichant une ambition sans limite.
 
L’objectif est de remplacer les importations chinoises et de répliquer ensuite le modèle à d’autres cultures.
 
Dernier projet en date : une méga-raffinerie de pétrole dans un nouveau complexe industriel à Lekki, en périphérie de Lagos. Prévue pour être opérationnelle en 2018, sa capacité de 650 000 barils par jour la mettra dans le top dix mondial et permettra au Nigeria, premier producteur africain de pétrole, de cesserd’importer des produits raffinés. Juste à côté, Aliko Dangote prévoit une unité de fabrication d’engrais très importante, dans le cadre d’un accord en cours de négociation avec l’Office chérifien des phosphates (OCP) du Maroc.
 
« Avec cette raffinerie, Dangote mettra la main sur plus de la moitié du marché de l’essence au Nigeria. Ses projets à grande échelle donnent un signal positif à tout le continent », dit aujourd’hui Sanusi Lamido Sanusi. L’ancien gouverneur de la Banque centrale du Nigeria devenu émir [chef traditionnel et religieux] de Kano est l’un des proches du tycoon. Ensemble, ils entendent développer ce nord du Nigeria, musulman et plus pauvre que le sud.

Aliko Dangote, qui possède déjà les plus grandes plantations du pays, y a inauguré il y a quelques semaines une usine de transformation de tomates. L’objectif est de remplacer les importations chinoises et de répliquer ensuite le modèle à d’autres cultures. Plus au sud, à Kaduna, il espère prendre le contrôle de Peugeot Nigeria, la seule usine automobile d’Afrique subsaharienne.

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